Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 février 2020 6 08 /02 /février /2020 13:22
Bernard Colombe, prêtre Fidei Donum, a connu Gaby au Brésil.

Bernard Colombe, prêtre Fidei Donum, a connu Gaby au Brésil.

Lettre de Gabriel Maire du 21 décembre 1989

 

Bien cher Bernard,

 

Le temps passe, et j'ai bien peu de temps pour écrire. Peut-être ne sais-je pas bien m'organiser. Je te remercie pour tes deux lettres arrivées après ton séjour au Brésil (en juillet), la dernière étant du 9 décembre.

On a un temps terrible : beaucoup de pluie, des inondations un peu partout au Brésil...C'est dommage qu'il faille attendre le 15 mars prochain pour que Collor vienne mettre un peu d'ORDRE au Brésil. Les militaires sont très contents...beaucoup de « chrétiens » aussi (Collor parle beaucoup de « Dieu »), même si beaucoup d'autres sont très déçus. La CNBB commence à montrer que les semonces de Rome portent des fruits : quelques évêques ont ouvertement pris position... mais si peu ! Suffisamment tout de même pour que, quand le nouveau président aura montré ce qu'il est (un dictateur), l'Eglise puisse dire que la hiérarchie ne l'a pas privilégié.

Vieille histoire du conflit entre le prophétisme et la prudence non-évangélique !

En tous cas, les moyens utilisés par Collor, la TV Globo, l'ensemble des supporters, ne sont guère à l'honneur du nouveau président.

Belle occasion perdue ! Pourtant la lutte a été belle ; et qu'un tourneur ait pu faire trembler si fort l'armée, le pouvoir économique, la bourgeoisie, les vieux politiques, les bons chrétiens pratiquants, etc... c'est déjà un pas énorme. Et finalement prendre les rênes d'un pays qui a un taux d'inflation de 54 % par mois (décembre) n'est pas si enthousiasmant.

La fête de l'installation de la paroisse St François d'Assise a été très belle. Pour le moment, le rythme est plus lent (heureusement!) mais les fruits seront cueillis peu à peu. Seu Zelino  dont tu me parles a voté Lula au ler tour, mais il a rejoint sa  famille naturelle au second, disant : « finalement les évêques ont dit qu'on pouvait voter l'un ou l'autre, qui ont presque le même programme ».

Je pense que j'irai en France en 90, de la 2ème quinzaine de juillet à la 2ème quinzaine de septembre. Darcio a déjà programmé d'aller en France (en réunissant l'argent de son salaire et des membres de sa famille) du 14 février à septembre. Pour avoir droit à un visa temporaire (et pas seulement de tourisme), il lui faudrait être inscrit à un cours, par exemple). J'en ai parlé à mon frère Bernard, mais je n'ai pas encore de réponse. Connais-tu quelque chose ?

Un bon Noël ! E feliz ano novo. Abraço   Gaby

 

PS Pourquoi tant de timbres ?! L'enveloppe était prête dès octobre...mais les tarifs augmentent 2 fois par mois... et l'ECT ne fait pas de timbres correspondants. Alors... !

Le 21 janvier 2020

 

Bien cher Gaby,

 

Il est temps de répondre à ta lettre du 21 décembre 1989 qui me souhaitait un bon Noël et un feliz ano novo. Mais les choses ne se sont pas du tout passées comme ça...

Deux jours après, une embuscade du coté de Castelo Branco, où tu  venais de célébrer un mariage, t'a fait entrer instantanément dans le monde nouveau pour lequel tu travaillais.

Tu avais curieusement demandé aux participants de chanter un cantique prévu pour le Jeudi-Saint ! Ce repas est le dernier, je vais vous quitter... Trente ans après, les gens reparlent encore de ce choix qualifié de prémonitoire. Les menaces que certains t'avaient faites à visage découvert dès le mois de juin, reprises en novembre je crois, t'avaient douloureusement ébranlé mais tu avais dit que tu voulais rester sur place par fidélité aux gens de Cariacica.

 

Tout cela est revenu à nos oreilles lors d'un voyage organisé par l'association fondée dans le Jura, ta terre natale, dès 1990. Tes amis jurassiens s'engageaient alors pour soutenir financièrement l'avocat contracté par ta famille afin d'essayer de déposer une plainte pour homicide, alors que la thèse de la police était celle d'un hold-up ayant mal tourné. Personne parmi tes paroissiens de Castelo Branco et de Porto de Santana n'ont cru une minute à cette fable et tous t'ont appelé martyr et prophète dès l'annonce de ta mort et aujourd'hui encore.

 

Mgr Legrez alors évêque à Saint-Claude, lors du 20ème anniversaire de ton assassinat, était étonné, lors de sa visite à Cariacica, que les gens se souvenaient encore de toi et il se demandait avec humour qui se souviendrait encore de lui 20 ans après sa mort ! Dix ans ont encore passé et notre petit groupe de 6 personnes (Elisabeth Lamy de la présidence collégiale, sa fille Rachel revenant d'une tournée à la rencontre d'acteurs de paix dans différents pays, les Pères Lucien Converset, ton ami d'enfance, et Jean-Marie Bouhans ancien Fidei Donum d'Argentine, François Phliponneau d'ATD, notre précieux photographe) a recueilli les témoignages émus de ceux que tu as mariés ou baptisés, et aussi de toutes ces personnes que tu as mises en route par une prise de responsabilité dans les communautés : il y avait déjà des ministres du baptême ou des témoins qualifiés du mariage, choisis par les communautés et formés de manière adaptée. Et puis nous avons écouté ceux et celles qui, par le biais de la pastorale de la jeunesse, issue de la JOC locale ou par la pastorale ouvrière, avaient pris goût à l'engagement social ou politique, ce qui, quelque temps auparavant, leur paraissait bien lointain ou décourageant.

 

L'un deux, Helder Salomão, aujourd'hui député fédéral et qui a été maire de cette grosse commune de Cariacica (400.000 hs aujourd'hui), créait, dans la semaine qui a suivi ta mort, une chanson que beaucoup connaissent par cœur et qui a été traduite depuis :

Je préfère mourir pour la vie que vivre pour la mort

(une phrase que tu avais prononcée quelques temps avant)

Parmi les gens qui souffrent, ta voix résonne encore très fort

Ton rêve de paix ne meurt pas

Démocratie est à l’œuvre aujourd'hui.

 

Ref  - Prophète Gabriel, ta lutte n'a pas été vaine.

Ton sang est semence de vie

Vienne le jour de la libération.

 

Ta foi et tes engagements ont dérangé les puissants

pour défendre le droit à la vie ou la lutte du travailleur

Ton rêve obstiné ne meurt pas,

Dieu toujours accompagne son peuple.

 

Ils ont fait taire un prophète. Un frère est encore tombé.

Ton cap nous le maintiendrons : éclosion d'un monde nouveau

Ton rêve Gaby ne meurt pas

Le Royaume avec nous se construit.

 

C'est un chant-symbole qui a été repris depuis trente ans dans les célébrations nombreuses qui ont marqué l'histoire de ta vie désormais dans la Vie. Elles sont ponctuées d'un : Gabriel, presente ! qui peut se lire à deux niveaux : ta présence comme celle d'un héros de cette histoire de libération qu'on ne veut pas oublier et celui de la foi qui croit à la vie après la mort. Et c'est vrai que ce voyage de trois semaines dans l'agglomération de Vitoria nous a fait vivre dans le passé, dans le présent et dans l'avenir.

 

Le passé a une forte note nostalgique car cette décennie des années 80 que tu as parcourues   a été celle des acquis de la précédente, de la structuration du diocèse en communautés ecclésiales de base et des pastorales sociales, de la forte participation des laïcs à tous les niveaux et dans le mouvement populaire qui renaissait déjà sous la dictature militaire. On allait tous vers un mieux... Donc les gens rencontrés parlent de ces années glorieuses avec saudade.

Pourtant tu sentais bien des réticences chez des laïcs et certains prêtres. Tes Echos de Vitoria adressés à tes amis du Jura et d'ailleurs (une équipe autour de Jovanir Poleze et de Dárcio Mosquem les a traduits et publiés il y a quelque temps) en sont le témoin. Et ta lettre le montre bien : tous n'ont pas eu ta vision politique et ecclésiale dont tu as, semble-t-il, hérité de ton père Henri, conseiller municipal pendant 25 ans (on vient de l'apprendre à Port-Lesney, lors de l'inauguration d'une place Gabriel Maire devant l'église de ton baptême).

 

Le présent est douloureux pour ceux que nous avons rencontrés. Et quand tu évoques le président Collor élu en 1989, et les inquiétudes qu'il te causait, en surimpression on lit Bolsonaro… Je me suis demandé si on ne se trouvait pas devant un champ de ruines : les militants sont perdus devant la politique autrement de cet ancien capitaine, les réseaux sociaux qui sont apparus depuis avec leur montage de fake-news difficiles à contrer, la montée de groupes chrétiens adeptes de la théologie de la prospérité ou grands amateurs de miracles ou de dévotion, l'abandon fréquent de la formation biblique chère à ton cœur, malgré des efforts méthodiques comme ceux du CEBI (centre d'études bibliques) que nous avons longuement rencontré. Heureusement, beaucoup cherchent des réponses à ces nouveaux défis, dont, paradoxalement, l'amélioration du niveau de vie individuel qui, ici comme ailleurs, a encouragé les solutions individuelles. Le combat collectif qui n'avait rien d'évident à ton époque s'est encore éloigné. Nous croyons avoir compris que la recherche porte sur le projet politique national, les politiques publiques y compris au niveau municipal, le retour à un lien entre les militants et la base, non sans inclure désormais l'écologie, bien remise au centre avec les pluies diluviennes de ces derniers jours.

 

On est déjà dans l'avenir avec ces relectures politiques et ecclésiales. Il ne faudrait pas oublier, pour ceux qui le désirent, la vision chrétienne de l'articulation entre vie personnelle, vie politique et Royaume. On pourrait revisiter utilement le vieux concept de Royaume pour ne pas se priver d'une dimension humaine fondamentale, celle de la Révélation, et que d'aucuns s'approprieraient volontiers pour ne rien changer. Je sens que tu serais à l'aise pour t'engager dans ces recherches et soutenir les jeunes qui s'y intéresseraient.

 

A propos des jeunes, on a cité là-bas avec un sourire ta manière d'encourager et d'améliorer leurs pratiques :

C'est bien ! Mais, tu pourrais faire mieux !

 

Parmi les jeunes que nous avons rencontrés, il y a ceux qui t'ont connu par leurs parents et qui gardent de l'admiration pour ton service pastoral avec eux. Certains ont développé une vision critique de la réalité et une foi communautaire. D'autres sont pris par les études, y compris universitaires, favorisées au temps du gouvernement Lula et qui leur ouvrent des professions et des rémunérations bien au-delà de celles de leurs parents des années 80. Les loisirs se sont sophistiqués aussi, avec leurs normes qui semblent s'imposer même dans les quartiers populaires. Là encore, nouveau défi pour l'évangélisation. Les communautés nombreuses dans chaque paroisse seront-elles encore un lieu-source pour cette jeunesse ?

 

Ces communautés que tu évoques dans ta lettre en te réjouissant de la fête de la création de la paroisse St François d'Assise à Porto de Santana-Flexal sont bien vivantes. Penha Lopes que tu as connue adolescente et qui est maintenant grand-mère ! et ses amies se sont mises en 4 pour nous faire rencontrer les communautés du Morro Aparecida, Flexal I et Flexal II, Porto Novo, Sao Sebastiao : partout la joie d'être membres d'une communauté, d'y avoir des responsabilités (baptêmes, mariages, liturgie, homélie, enfance, finances, groupe de couples, apostolat de la prière etc...). Le contexte ne favorise pas un engagement social, mais l'expression dominante de la foi des catholiques c'est la participation à une vie communautaire. Le denier de l'Eglise est organisé pour l'autonomie financière de la communauté et la participation aux charges paroissiales et diocésaines. Je crois que ça donne une identité aux gens et une légitime fierté.

 

Bien sûr, ta volonté d'une paroisse sans église principale, avec des communautés égales en responsabilité n'a pas tenue longtemps : les vieux démons du prestige et d'un modèle plus clérical en ont eu raison. Mais selon le talent et la volonté de l'équipe prêtres et diacres, on peut éviter la perte d'une si belle richesse. Reste la question des chrétiens formés « à l'ancienne » très mal à l'aise dans le style charismatique encore dominant.

 

A la suite du voyage de 3 semaines au Brésil, qui a inclus une belle messe à la cathédrale avec l'évêque Dom Dario, fort engagé depuis son arrivée dans cette mémoire vivante de ta vie, et l'évêque émérite Geraldo en retraite à Vitória (et de tant d'autres choses organisées par le groupe Ecos de Gaby et l’association Padre Gabriel Maire pour la défense de la vie), les Jurassiens ont accueilli dans le diocèse de Saint-Claude une délégation de 7 brésiliens, dont le Père Manoel qui t'avait connu au séminaire et qui t'a remplacé un temps à Castelo Branco. J'ai été avec eux la plupart du temps, logé chez Joëlle Amiet dont le veuvage récent l'avait empêchée de participer au voyage.

 

Ils venaient découvrir le Gabriel français, comme nous avions découvert ou redécouvert le Gabriel brésilien. Penha Lopes, Penha Dalva, Raquel Passos, Joana, Oscarina d'Itaciba qui ne t'a pas connu, Jovanir Poleze qui parle français et le Père Manoel, ont circulé de Port-Lesney (où ta sœur Marie Thérèse nous a reçus au milieu de mille souvenirs de toi), à Saint-Claude en passant par Dole, Lons, Mont sous Vaudrey, Montmirey, Acey, Poligny (accueillis par l'administrateur diocésain) et j'en oublie peut-être. Ils ont découvert la campagne et le froid, le pain, le fromage et le vin, les villes historiques et leurs magnifiques églises, les quartiers populaires, le monastère des trappistes où tu allais faire des retraites, les Clarisses qui ont accueilli une étonnante célébration brésilienne tout près des reliques de Ste Colette, des engagés politiques du Jura et de vieux amis de l'armée touchés par ton engagement contre la torture. Une conférence de Rémy Gaudillier nous a fait découvrir à tous l'avant-Brésil de ton histoire. Lulu nous avait déjà branché sur la continuité entre tes engagements de jeune au petit séminaire, de soldat du contingent, de secrétaire général du Mouvement Populaire des Citoyens Du Monde, et cela nous avait éclairé et chassé quelques erreurs d'interprétation comme celle de croire que tes engagements au Brésil dataient de ton arrivée là-bas.        

 

Le groupe des 7 a été amené à se présenter à de nombreuses reprises, ce qui nous a permis à nous aussi les « Brésiliens » de mieux les connaître, de découvrir l'impact de ta vie sur la leur, la durée de cette influence, mais aussi les nouveaux défis que tu ne pouvais prévoir et qui sont de leur responsabilité aujourd'hui. Ils ont apporté un très beau livre de témoignages recueillis au Brésil lors des célébrations de décembre. A lire, bientôt !

 

Faire mémoire, recueillir tous les éléments possibles de ce puzzle, peut-être demain faire des travaux plus historiques, là-bas et ici, te situer dans une phase de l'histoire du Brésil et de l'Eglise du Brésil, en particulier de cette Eglise remarquable de Vitória, tout cela va demander des talents et du temps. A la suite de Dom Luiz, l'ancien évêque, Dom Darío reprend l'idée d'un éventuel procès en béatification pour cause de martyre. Il demande de recueillir des témoignages et selon la moisson il verra s'il est bon de nommer un postulateur de ta cause. Sans doute le livre des témoignages  aura une bonne place dans ce processus.  Je ne sais pas comment tu prends cela... mais il ne dépend pas de toi de t'en occuper cette fois !

 

Et puis la vie continue : dans quelques jours commencera la Campagne de la Fraternité pour le carême 2020. Tu y attachais beaucoup d'importance. Cette initiative de la Conférence épiscopale brésilienne depuis 50 ans s'appuie cette année sur l'épisode évangélique du bon Samaritain :

Il vit, il a eu de la compassion et s'en est occupé Lc 10, 33-36.

J'ai parcouru le matériel produit et distribué dans les communautés et les paroisses. On m'a dit que beaucoup n'en font rien, car la dimension sociale de la foi n'intéresse pas beaucoup de prêtres. Cependant pour qui veut fouiller, en particulier le gros document, appelé manuel, il y aura des chrétiens pour y puiser le courage de regarder la réalité, de se sentir touchés et la force d'agir. Certes l’image de la charité samaritaine est celle de Sr Dulce de Salvador (1914-1992) récemment canonisée qui n'est pas celle d'un martyr des conflits sociaux... et dont la liste est pourtant longue. Mais plutôt celle d'une charité compassionnelle (et efficace) sur les conséquences de la misère. Je veux croire que ce point de départ sera fécond, lorsqu'on se souvient qu'Helder Câmara, que tu appréciais et qui a guidé ton départ pour l'Amérique Latine, a été bousculé par notre Cardinal Gerlier de Lyon après le congrès eucharistique de Rio, qui s'inquiétait de la prolifération des favelles. Plus tard il dira : Lorsque je donne à manger à un pauvre, je suis un saint, lorsque je demande : Pourquoi a-il faim ? On me traite de communiste.

 

J'ai pensé à toi et à quelques autres, en Amérique Latine et maintenant en Afrique de plus en plus fréquemment, en lisant  le pape François dans sa  Lettre aux prêtres du 4 août dernier :

Il serait injuste de ne pas être reconnaissant pour tant de prêtres qui, de manière constante et honnête, donnent tout ce qu'ils sont et ce qu'ils possèdent pour le bien des autres (cf 2 Co 12, 15) et développent une paternité spirituelle capable de pleurer avec ceux qui pleurent. Ils sont innombrables les prêtres qui font de leur vie une œuvre de miséricorde, dans des régions ou des situations si souvent inhospitalières, éloignées ou abandonnées, même au risque de leur propre vie.

 

J'ai été un peu long, tu connaissais sans doute tout ça et bien plus, mais il me semble que    je te devais cette réponse même tardive et ce compte-rendu d'un anniversaire qui fera date.

 

Le bienheureux Charles de Foucauld que tu aimais depuis ton séjour à Colomb-Béchar, demandait qu'on s'intéresse moins aux saints qu'à Celui qu'ils désignent ! On va essayer !

 

Bernard Colombe

 

PS. Figure-toi que j'allais oublier deux événements étranges pour quelqu'un habitué à la laïcité à la  française ! Nous avons été invités au Conseil municipal de Cariacica et à l'Assemblée législative de l'Etat pour recevoir une médaille et un diplôme liés à l'histoire de Gabriel Maire sur ces territoires. A l'initiative d'un conseiller municipal, Elinho de Lima et d'une députée, Iriny Lopes, l'un et l'autre du Parti des Travailleurs, nous faisions partie des gens honorés à cause de leurs liens avec ton action exemplaire pour les droits de l'homme. Ils avaient invité des intervenants qui ont fait des discours très appropriés sur ton rôle à cette époque, puis ont décoré de nombreuses personnes actives dans la société d'aujourd'hui. Ils n'avaient pas oublié ta famille à qui j'ai remis les médailles et les diplômes. Marie-Thérèse m'a demandé de leur écrire une lettre de remerciement, ce que je viens de faire par l'intermédiaire de Penha Lopes, attachée parlementaire de Helder Salomão. Tout cela sera bien enregistré dans les archives de ces deux lieux symboliques du pouvoir, où est intervenu le missionnaire  français et le prophète brésilien, selon la trouvaille de Marlene Lopes et  de sa fille en parlant de toi, pour le T-shirt du 30ème anniversaire de ton assassinat !

 

  • Autre chose : quand tu rencontreras Jésus, demande-lui s'il te plait ce qu'il pense du samba du Carnaval de Rio de cette année qui parle de lui et l'appelle « Jesus da gente », quelque chose comme : Jésus de chez nous. Je l'ai trouvé très bon et ça devrait te plaire.
Partager cet article
Repost0
6 décembre 2019 5 06 /12 /décembre /2019 17:01
Bemvidos ao Brasil

Nous devions être 7 à quitter la France pour nous joindre aux Brésiliens qui en ce mois de décembre, et déjà de nombreuses fois au cours de cette année, rendent hommage au Padre Gabriel en ce 30ème anniversaire de son assassinat. 

Serge nous a quitté brutalement il y a 15 jours, il est mort dans un accident de la route. Avec Joëlle, son épouse, ils devaient se joindre à nous. Noël est proche, et c'est important pou Joëlle de vive Noël avec ses enfants et petits enfants. Ils resteront dans nos cœurs tout au long de ce voyage.

 

Serge et Joëlle, merci.

Serge et Joëlle, merci.

Nous sommes donc 5. Rachel est déjà au Brésil depuis mi-octobre dans le cadre de son tour du monde pour rencontrer des jardiniers de paix. 

Nous venons du Jura, Lucien Converset et Jean-Marie Bouhans, et Elisabeth Lamy, de Lyon : le père Bernard Colombe, et de Pertuis dans le midi : François Phliponeau bien connu dans le mouvement ATD (Aide à toute détresse).

 

Carlita est venue de Vitória pour nous accueillir à Rio. Nous sommes pour le Week-End chez Tereza et Marcel Renou. 

Quelle émotion !!! nous sommes tellement heureux de nous retrouver et de nous serrer dans les bras !

 

Merci amies et amis brésiliens pour votre fidélité et votre témoignage de foi.

Bemvidos ao Brasil
Bemvidos ao Brasil
Bemvidos ao Brasil

Et voici l'interview de Jean-Marie sur RCF Jura.

Partager cet article
Repost0
31 juillet 2018 2 31 /07 /juillet /2018 18:00

Pour marquer l'anniversaire de la naissance de Gabriel MAIRE, né le 1er août 1936 à Port-Lesney, voici une longue page écrite en janvier 2018 par le père Bernard COLOMBE, prêtre fidei donum avec Gabriel à Vitória. Il nous montre comment son confrère était engagé dans la nouvelle évangélisation, priorité de l'Eglise Catholique depuis le pontificat de Jean-Paul II.

Acrostiche de Gabriel par Darcio

Acrostiche de Gabriel par Darcio

L’Eglise universelle s’engage vers une nouvelle évangélisation 

 

Dix ans avant l'assassinat du père Gabriel MAIRE, le 23 décembre 1989, l'Eglise universelle était entrée par la voix de Jean Paul II dans la nouvelle évangélisation. C'était exactement le 9 juin 1979, en Pologne. Cette expression a été reprise par lui 250 fois ! Le pape Benoit XVI l'utilisera assez souvent, par exemple lorsqu'il promulgua une année de la foi du 11 octobre 2011 au 24 novembre 2012 en vue d'un « engagement ecclésial plus convaincu en faveur d'une nouvelle évangélisation ».

 

Gaby, Martyr de la libération

 

Les témoignages écrits et oraux de Dom Silvestre Scandian, archevêque de Vitoria, Espirito Santo, Brésil, puis de son successeur Dom Luiz Mancilha, comme d'une multitude de laïcs et de religieux brésiliens, font un écho clair et direct à ces paroles de Benoit XVI. Ils peignent le portrait d'un prêtre engagé dans son Eglise d'adoption, au titre de Fidei donum de 1980 à sa mort. Un livre édité au Brésil pour les 25 ans de son assassinat en est un témoin essentiel : -Padre Gabriel Prefiro morrer pela vida a viver pela morte (pas encore traduit en français). 134 pages de témoignages recueillis dès 1990, par un groupe d'amis.

 

Zé Vicente, compositeur que Gabriel avait fait venir du Nordeste à Porto de Santana, écrit ainsi :

Jusqu'à quand annoncer la libération sera-t-il une raison de mourir assassiné ? Triste société qui ne supporte pas la moindre dose d'amour envers ses opprimés ! Pauvre démocratie commandée par des criminels, sinistres messieurs habillés d'impunité et de propagande !

 

Et Sr Terezinha :

Père Gabriel, merci d'avoir collaboré à mon processus de formation, comme Missionnaire de Jésus crucifié ! Merci, car vous m'avez aidé à découvrir l'eucharistie comme une révolution dans ma vie. Vous êtes vivant dans le cœur de celles et ceux qui vous ont connu. Pour votre engagement auprès des privilégiés de Jésus, vous êtes devenus martyr de la libération, pour la plus grande gloire de Dieu.

 

Nous pouvons citer ici une partie de l'homélie de Dom Silvestre pour le 1er anniversaire de la mort du Père Maire :

Notre compagnon et frère sur le chemin parcouru ensemble a laissé une phrase prophétique qui s'est dressée comme un drapeau de convocation afin de ne pas nous décourager et continuer la lutte : je préfère mourir pour la vie que de vivre pour la mort. Cette phrase a été une devise, un idéal de vie, inspirée des paroles du Maître dont nous commémorons la naissance : Je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir et donner ma vie pour la libération de beaucoup. (In : Serenidade em meio a altas ondas - biographie de Dom Silvestre, éditée au Brésil).

 

Et puis 27 ans plus tard, Dom Luiz Mancilha qui n'avait pas connu Gabriel écrivait à l'évêque de St Claude, Mgr Jordy :

Dans ma visite pastorale à la paroisse St François à Porto de Santana, j'ai entendu de fidèles chrétiens des beaux commentaires au sujet du Père Gabriel Maire comme un homme de Dieu. Son témoignage fort et la clarté de ses paroles et de ses attitudes ont résonné dans le cœur de plusieurs prêtres de ce diocèse. 27.09.17

Quelques jours plus tard, après l'annonce de la prescription du procès le 18 octobre, Dom Luiz signe un communiqué à la presse qui se termine ainsi :

Le Père Gabriel est certainement un des martyrs de l'Eglise en ces temps de tant d'injustice et de manque d'éthique.

 

Poster créé par l'association

Poster créé par l'association

Prêtre Fidei Donum à Vitória

 

Gabriel Maire avait répondu à la demande de Dom João Batista e Dom Luiz Fernandes de venir travailler dans ce grand diocèse où étaient déjà passés 4 prêtres français. Deux d'entre eux avaient pourtant déjà été menacés de mort en 1987, à Linhares. Son ministère sacerdotal aura été essentiellement paroissial et d'accompagnement de la pastorale ouvrière diocésaine. Sa volonté de rester au milieu du peuple qui lui avait été confié, au moment où des menaces de mort se précisaient sur sa personne, reste le signe le plus parlant de l'adhésion de Gabriel Maire à ce projet missionnaire universel, concrétisé sur un point limité de l'immense Brésil. Par sa mort, il rejoignait les dizaines de personnes assassinées pour leur résistance à l'oppression, dont plusieurs au nom de leur foi et de leur ministère, appelées spontanément par le peuple croyant : les martyrs du chemin fait ensemble.

Grand désir de vivre au diapason du monde

 

Ces 9 années au Brésil faisaient suite à une présence originale et résolument missionnaire dans le diocèse de St Claude, Jura, dans la diversité des ministères reçus. Grand désir de vivre au diapason du monde, aux côtés de tout homme de bonne volonté, comme « citoyen du monde », et déjà, comme séminariste, présence précieuse pour ses camarades pendant la guerre d'Algérie. Le 24 octobre 1977, il concluait dans La Croix jurassienne la riche interview qu'il avait donnée à propos de « prêtre et politique » :

« Je souhaite qu'on s'habitue à connaître les options de chaque prêtre sans croire qu'il veuille imposer ses idées. C'est l'apprentissage de la liberté dans l'Eglise, donc une franche diversité. Je souhaite que les communautés chrétiennes, prêtres et laïcs ensemble, deviennent plus prophétiques, en actes, pour que la Parole devienne plus crédible. (in Un prêtre... Karthala p 17-21.)

Evangélisation du monde moderne

 

Il était nourri de la réflexion et des décisions des Pères du Concile Vatican II et quelques années plus tard de l'Exhortation apostolique de Paul VI Evangelii nuntiandi de 1975 sur l’évangélisation du monde moderne. La même année le Conseil permanent de l'épiscopat français publiait : Libérations des hommes et salut en Jésus Christ, où on pouvait lire :

Nous ne serons pas fidèles à l'unité et à l'unicité du dessein de Dieu, à l'unité de la vocation de la personne humaine et de l'humanité, si nous ne prenons pas une part active aux actions et aux combats de libération humaine. C'est au cœur du monde qu'il s'agit d'annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle, aux opprimés la libération, aux affligés la joie.

Le choix prioritaire des pauvres

 

A son arrivée dans le diocèse de Vitoria, il s'est intégré dans une Eglise locale largement organisée en Communautés ecclésiales de base (CEB) par l'archevêque Dom Joao da Motta et son auxiliaire Dom Luis Fernandes. Un grand enthousiasme parcourait les paroissiens heureux de participer à la mission dans les périphéries et les campagnes. Gabriel Maire ne faisait pas partie des résistants à ce renouveau ecclésial promu par la Conférence des évêques du Brésil (CNBB). Au contraire, il apportait toute sa fougue et ses compétences à ce vaste chantier. Le choix prioritaire des pauvres assumé par le CELAM (Conseil épiscopal d'Amérique latine) dès 1968 était devenu le sien.

Photo d'un ami du Brésil

Photo d'un ami du Brésil

Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Evangile !

 

Pour ses 25 ans de presbytérat, Gabriel Maire avait célébré une messe en plein air. Sur un calicot en arrière de l'autel, il y avait la phrase de st Paul citée par Jean Paul II pour faire entrer dans le grand Jubilé de l'an 2000 :

Nous devons raviver en nous le sentiment enflammé de Paul qui s'exclamait : Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Evangile ! 1 Co 9, 16. Cette passion ne manquera pas de susciter dans l'Eglise un nouvel esprit missionnaire, qui ne saurait être réservé à un groupe de spécialistes, mais qui devra engager la responsabilité de tous les membres du peuple de Dieu.

 

Engager la responsabilité de tous les membres du peuple de Dieu, a été la priorité de Gabriel Maire en lien avec l'Eglise de Vitoria, attaché qu'il était à donner à ses membres jusque là passifs, se jugeant incapables, l'expérience d'assumer progressivement leur vocation de laïcs à part entière.

Transformation de la société comme signe de la réalisation du Royaume

 

Ses lettres à sa famille et à ses amis français appelées par lui Echos de Vitoria ont été éditées en 2014 sous le titre Gabriel Maire Un prêtre français assassiné au Brésil 1936-1989, chez Karthala.

Il a été traduit en portugais par des amis et édité depuis. Au long des presque 300 pages, on peut suivre l'évolution de ses convictions et de ses pratiques, ses joies et ses souffrances et ainsi accompagner la mise en œuvre de cette évangélisation renouvelée dans les paroisses de Cariacica et de Viana. Mise en œuvre « nouvelle en son ardeur, dans ses méthodes, et dans ses expressions », selon Veritatis splendor du 6 août 1993, déjà bien pratiqué en particulier dans de larges secteurs de l'Amérique latine. On peut aussi se reporter aux Options et directives pastorales de l'Eglise de Vitoria, éditées en 1987 chez Paulinas, où l'on parle entre autres priorités de collaborer davantage dans la transformation de la société comme signe de la réalisation du Royaume cf. p 48 et 49.

Conversion individuelle et pastorale

 

Quand on entend aujourd'hui, 28 ans après la mort de ce missionnaire français, les laïcs commenter, en se souvenant de paroles et de gestes concrets, la manière dont leur curé leur permettait de donner le meilleur d'eux-mêmes, à partir d'une connaissance de l'Evangile, ou mieux d'une expérience d'Evangile, on se réjouit que la nouvelle évangélisation avait été prise très au sérieux.

 

L'objectif général de l'action de l'Eglise au Brésil commençait d'ailleurs son intitulé par : Evangéliser. C'était un processus de conversion individuelle et pastorale auquel le Père Maire avait joyeusement adhéré.

 

Le coté infatigable de sa vie ministérielle, les méthodes de participation appliquées à toutes les décisions pastorales et missionnaires, les expressions liturgiques dans les petites chapelles en planche ou en dur, les grands temps forts de l'année, avec leurs neuvaines, processions, en particulier au sanctuaire marial de Nossa Senhora da Penha, théâtres, formation biblique, chants, rédaction de psaumes etc... comme sa présence courageuse dans les conflits de la terre urbaine, le soutien des femmes menacées dans leur intégrité corporelle, l'appui aux balbutiements de la démocratie, le renforcement de la pratique syndicale, après 20 ans de dictature, bref une lutte contre les « structures de péché » comme l'avait remarqué Jean Paul II, voilà bien quelques exemples faciles à retrouver et avec force détails dans sa correspondance qui confirment un choix missionnaire résolu.

Formation des prêtres et des laïcs

 

Les prêtres étaient vus aussi par le pape de l'époque comme des acteurs privilégiés, à condition, écrivait-il dans un texte de 1993, qu'ils aient une formation initiale et continue, une connaissance intime de la Parole de Dieu, une sainteté de vie, un nouveau style de vie pastorale, une collaboration avec les laïcs et une profonde communion avec le Pape et les évêques. La résidence provisoire e Gabriel au séminaire diocésain a permis un beau témoignage sur ce point.

 

Les laïcs, eux, selon Christifideles laici, 1988, étaient encouragés : ils ont leur rôle à jouer dans la formation de la communauté ecclésiale, non seulement par une participation active et responsable à la vie communautaire, mais aussi par l'élan et l'action missionnaire en direction de ceux qui n'ont pas encore la foi ou qui ne vivent pas selon la foi reçue au baptême. Les lettres lues dans les Echos de Vitoria tout autant que les témoignages recueillis après la mort du Père Gabriel Maire rassemblent un grand nombre de réalisations dans ce sens.

 

Les temps de retraite spirituelle, parfois loin de Vitoria du côté d'Alagoinhas (BA) dans la communauté de Taizé ou bien à Crateus dans le Piaui, montrent bien son souci du ressourcement pour un engagement aussi fort dans l'évangélisation. Les prédications au cours des nombreuses messes du dimanche dans 3 ou 4 communautés, étaient de riches moments d'approfondissement de l'Evangile, tout comme les enseignements donnés par exemple aux charismatiques de la paroisse de Campo Grande.

La théologie de la libération

 

L'Instruction sur Liberté chrétienne et libération, du 22 mars 1986, rédigée par le Cardinal Ratzinger et approuvée par Jean Paul II, faisait suite au premier document de septembre 1984 intitulé Quelques aspects de la théologie de la libération. Les dates situent ces deux documents en plein dans le ministère du Père Maire. L'Eglise de Vitoria a bien sûr fait des études sur les remarques et recommandations romaines, qui mettaient beaucoup de réserves sur le type d'engagement qu'elle vivait, en lien avec beaucoup d'autres au Brésil et en Amérique latine. Et cependant on trouvera dans le 2ème document la reconnaissance de cette manière de rendre présent l'évangile auprès des pauvres. Citons n° 57 :

 

Une foule de chrétiens, depuis le temps des apôtres, ont engagé leurs forces et leur vie pour la libération de toute forme d'oppression et pour la promotion de la dignité humaine. L'expérience des saints et l'exemple de tant d’œuvres au service du prochain constituent un stimulant et une lumière en vue des initiatives libératrices qui s'imposent aujourd'hui.

 

Le 100ème et dernier paragraphe commence ainsi :

Il est vrai que devant l'ampleur et la complexité de la tâche, qui peut requérir le don de soi jusqu'à l’héroïsme, beaucoup sont tentés par le découragement, par le scepticisme ou par l'aventure désespérée.

 

Ses amis savent que Gabriel Maire a eu des moments de découragement, mais pas de scepticisme et moins encore de tentation d'aventure désespérée, ce qui dans le langage ecclésiastique de cette Instruction désigne la guérilla.

Bâtir une civilisation de l’amour

 

Bâtir une civilisation de l’amour (expression de Paul VI) au sein d'un Brésil fortement inégalitaire, dans la rudesse de la vie des classes populaires, avec leurs souffrances, leurs blessures et leurs espoirs, dans les déceptions surmontées lorsque les puissants impriment leurs pensées par la télévision dans des foyers où tout manque, évoquées ainsi par Dom Silvestre :

Je pense surtout aux élites économiques et politiques de notre pays, je pense aux banquiers et aux grands propriétaires, nos grands politiques et entrepreneurs... eux tous, sauf de rares et louables exceptions, tournent le dos au futur, sentant l'odeur de la fumée de l'incendie qui se développe dans les maisons voisines tout en fermant les yeux sur le danger qui frappe leur propre maison... et donc je préfère mourir pour la vie à vivre en causant la mort des autres. (dans l’homélie de Dom Silvestre du 1er anniversaire)

 

Oui bâtir une civilisation de l'amour, telle est la relecture que l'on peut faire de la vie de ce prêtre diocésain français, le Père Gabriel, Roger, Félix Maire, comme il était connu officiellement au Brésil et plus encore comme Padre Gabriel, comme en témoignent des signes durables : un quartier de Cariacica, une place, un buste sur une place publique et une école pour handicapés mentaux qu'il avait aidée à construire, sans compter les brésiliens qui ont reçu Gabriel comme nom de baptême !

Note : outre les documents cités dans cet article, en français ou en portugais, un petit livre m'a aidé dans les dates et les citations : La nouvelle évangélisation de Jean Paul II à Benoît XVI, de Jean Philibert, aux éditions des Béatitudes 2012 112 pages

 

                                                                                                               Bernard Colombe - Janvier 2018

Les amis de Vitória se réunissent le 1er août.

Les amis de Vitória se réunissent le 1er août.

Partager cet article
Repost0
4 février 2016 4 04 /02 /février /2016 13:40

Cleunice, Dárcio e Jovanir

11 dias nos passos de Gaby, na França

Por: Jovanir

 

"Eles não sabiam que era impossível...

então, fizeram"

Quarta-feira, 06 de janeiro de 2016

 

Após 11 horas de vôo, chegamos um tanto cansados ao aeroporto de Paris (Charles de Gaule). Constantes momentos de turbulência obrigaram os passageiros a permanecer quase o tempo todo sentados durante o vôo. Às vezes eu tive a impressão de que essa exigência não passava de uma estratégia dos comissários de bordo a fim de terem menos movimento nos corredores; afinal, salvo alguns momentos - em minha opinião de leigo no assunto de vôos -, nem havia tanta turbulência assim.

 

Chegamos com 15 minutos de atraso a Paris, o que fez com que tivéssemos que correr por diversos longos corredores para não perder o vôo para Lyon. Perdemos. Não porque não corremos o bastante, mas porque, devido o atraso no vôo, a empresa não teve tempo  hábil de transportar as malas de um avião para o outro. Foi preciso esperar o próximo vôo; e não tínhamos como avisar ao padre Bernard, que nos aguardava em Lyon.

 

Tomado o avião para Lyon, chegamos ao aeroporto Saint Exupéry (Homenagem ao autor do célebre livro "O Pequeno Príncipe"), e lá estava o padre Bernard com um grande sorriso e braços abertos para nos acolher.

 

Ao longo do caminho até sua casa misturávamos francês e português em nosso diálogo. Pareceu-me que assim estava bem para todos.

 

Padre Bernard COLOMBE já exerceu seu ministério no Brasil, entre os anos 1974 e 1983. Seu principal local de atuação foi a região de Cariacica, na linha dos padres engajados no meio popular, o que quer dizer que não estava lá apenas para celebrar os sacramentos, mas também para contribuir na diminuição do sofrimento do povo, por meio da conscientização das pessoas acerca da realidade em que vivem, apontando caminhos de solidariedade entre si (campanhas, mutirões,...), e de ação conjunta junto a órgãos governamentais em prol de melhorias para o bairro (água encanada, redes de esgoto, postos de saúde, transporte coletivo, dentre outros).

 

Pe. Colombe chegou a morar uns dois anos com Gabriel, em Vera Cruz - Cariacica. Os dois, juntamente com o padre João, eram conhecidos carinhosamente como "os padres franceses" pelas pessoas da localidade.

 

O frio de Lyon já nos acompanhava desde o aeroporto. Cerca de 8 graus, e diminuindo. Em sua casa um almoço nos esperava, com um simpático bilhete da cozinheira, dando boas-vindas aos três brasileiros.

 

Cleunice disse que ela mesma não acreditava estarmos conseguindo realizar esta viagem. Simpaticamente, o padre Bernard então nos disse um ditado que os franceses usam com certa frequência: "Eles não sabiam que era impossível... então fizeram".

 

Um breve passeio a pé pelas ruas vizinhas nos fez conhecer um pouquinho a região.

A noite foi chegando devagarinho.

Dárcio e Cleunice foram para a casa de Marielle, irmã de pe. Bernard. Eu fiquei na casa dele.

Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio
Photos de Cleu et Darcio

Photos de Cleu et Darcio

Cleunice, Dárcio et Jovanir

 

Onze jours sur les pas de Gaby, en France

Par Jovanir

 

"Ils ne savaient pas que c'était impossible…

alors, ils l'ont fait"

Mercredi 6 janvier 2016

Après onze heures de vol, nous arrivons, un peu fatigués, à l'aéroport Charles de Gaulle à Paris. Des turbulences continues ont obligé les passagers à demeurer assis presque pendant tout le vol. Parfois, j'avais l'impression qu'il s'agissait simplement d'une stratégie des commissaires de bord pour avoir moins de passages dans les couloirs ; finalement, si l'on excepte certains instants – à mes yeux de novice à propos de voyages en avion – il n'y avait pas tant de turbulences que cela.

Nous arrivons à Paris avec quinze minutes de retard, ce qui fait que nous avons dû courir dans plusieurs longs couloirs afin de ne pas rater le vol pour Lyon. Nous l'avons raté. Non pas parce que nous n'avons pas couru assez vite, mais parce que, étant donné que le vol avait du retard, la compagnie n'a pas eu le temps suffisant pour transborder les valises d'un avion à l'autre. Nous avons dû attendre le vol suivant ; et nous n'avions pas de quoi avertir le Père Bernard, qui nous attendait à Lyon.

 

Une fois dans l'avion de Lyon, nous arrivons à l'aéroport Saint Exupéry (Hommage à l'auteur du célèbre livre "Le Petit Prince") et là se tenait le Père Bernard avec un grand sourire et les bras ouverts pour nous accueillir.

 

Tout au long du chemin vers son appartement, nous avons mélangé, dans notre dialogue, français et portugais. Il me semble que c'était bien ainsi, pour chacun d'entre nous.

 

Le père Bernard COLOMBE avait effectué son ministère au Brésil, déjà dans les années entre 1974 et 1983. Il a exercé principalement dans la région de Cariacica, dans la lignée des prêtres engagés en milieu populaire, ce qui veut dire qu'il était là, non seulement pour célébrer les sacrements, mais encore pour essayer de diminuer la souffrance du peuple, en conscientisant les personnes autour de leur vécu, leur montrant des chemins de solidarité (campagnes d'action, travaux en commun,… initiatives prises en accord avec les services gouvernementaux pour mieux organiser le quartier en installant canalisations d'eau, réseaux d'égouts, postes de santé, transport collectif, parmi d'autres.)

 

Le Père Bernard Colombe est venu habiter quelque deux années avec Gabriel, à Vera Cruz-Cariacica. Les deux prêtres, avec aussi le Père Jean (Fugeray), étaient connus et aimés par les gens de la localité, comme « les prêtres français ».

 

Le froid de Lyon nous accompagnait déjà depuis l'aéroport. Environ 8° et cela continuait à diminuer. Chez Bernard, un repas nous attendait, avec un sympathique petit mot de la cuisinière, souhaitant la bienvenue aux trois Brésiliens.

 

Cléunice nous a dit alors qu'elle-même ne croyait pas que nous arriverions à faire ce voyage. Aimablement, le Père Bernard nous a alors cité un dicton que les Français utilisent assez couramment : "Ils ne savaient pas que c'était impossible…alors ils l'ont fait".

 

Une brève promenade à pied par les rues voisines nous a fait connaître un tout petit peu les alentours.

 

La nuit est arrivée tout doucement.

 

Dárcio et Cleunice sont allés chez Marielle, sœur du Père Bernard. Et moi, je suis resté chez lui.

 

(traduit du portugais en français par Claudette et Paul)

 

Partager cet article
Repost0
27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 21:57

Ce texte est paru dans le journal La Croix peu de temps après la mort de Gaby. Il a été écrit par Jean, celui que Gaby venait remplacer à Vitòria et que nous pleurons maintenant puisqu'il est mort le 23 octobre dernier. La dernière phrase de cette lettre nous paraît prophétique quand on prend en compte le travail fait par nos amis de Vitòria, dans la continuation de l'esprit du Padre Gabriel. 
 

Jean Fugeray avec Claudio Vereza en 2009

Jean Fugeray avec Claudio Vereza en 2009

En 1980, tu arrivais à Vitòria (Brésil), en pleine dictature militaire. Bernard, Marcel et moi nous étions heureux de t'accueillir. Très vite tu es devenu notre frère.


Très vite ton enthousiasme naturel t'a fait aimer le Brésil, ton pays d'adoption. Tu t'es mis avec acharnement à apprendre la langue avec une institutrice de notre quartier. Tu aimais descendre à pied de chez nous jusqu'à chez elle pour te mêler au peuple, à la foule et, tout de suite, partager la vie des gens. Des années durant, tu t'es déplacé ainsi à pied, en car urbain, bousculé dans la poussière, dans la boue ou sous la pluie comme n'importe lequel des habitants du coin.


Gabriel, prêtre de Jésus-Christ, tu y croyais, toi, à l'incarnation. Depuis longtemps tu étais "citoyen du monde" ouvert à l'univers. C'est sans doute pour cela que tu as quitté ton Jura natal. Et pour toi, être prêtre, c'était "vivre avec", vivre ensemble, travailler ensemble, évangéliser ensemble, découvrir, organiser ensemble, avec les gens, toujours avec eux.


Tu avais toujours plein d'idées, un agenda bourré de rendez-vous. Pas étonnant ! Ton peuple c'était plus de vingt communautés de base urbaines, plus de 50 000 habitants en bordure d'une capitale, dans un coin plus semblable à un bidonville qu'à autre chose. Tu étais aussi coordonnateur de tout le secteur de 200 000 habitants. Tu donnais des cours de pastorale au Grand Séminaire. Tu étais aussi responsable de la Pastorale ouvrière et de mouvements de jeunes. Et bien d'autres choses encore.


Mais tu faisais toujours confiance, tu soutenais, tu étais un "multiplicateur d'apôtres".  (…)
Tu ne savais pas – et tu ne pouvais pas – te taire. Tu aimais écrire, parler, dénoncer. Tu avais un don de journaliste. Parce que pour toi, comme pour tant d'autres en Amérique latine, "la lutte pour la justice faisait partie intégrante de l'évangélisation" (…) Tu as dénoncé les conditions d'oppression de la femme, les ligatures de trompes, faites en série et gratuitement au moment des élections, par un médecin de ton quartier, qui voulait ainsi gagner des bulletins de vote. Tu as dénoncé les injustices continues d'une famille au pouvoir dans ton coin depuis près de vingt ans, abusant du peuple et dominant de son pouvoir les gens qu'elle aurait dû servir… Et grâce à toi les gens s'organisaient, prenaient courage.
Tu dénonçais…


Tu souffrais des événements de l'Eglise, de Recife particulièrement, …de tout ce qui freinait les acquis du Concile.


Gabriel, maintenant tu as rejoint le Seigneur ton frère, celui que tu aimais rencontrer dans la prière, la Bible, les pauvres. Tu as rejoint cette foule immense d'ouvriers, de paysans, qui ont été assassinés par des tueurs à gage à la solde des grands propriétaires toujours plus avides ou des hommes politiques corrompus. Là-bas on risque sa vie quand on parle de partage, du droit à la terre pour les paysans, de réforme agraire, de justice sociale. Les grands ont tout "acheté"…et le projet de réforme agraire n'est pas entré dans la nouvelle constitution de 1988.
Et bien sûr, c'est quand on dénonce tout cela qu'on est traité de "communiste", que l'on soit prêtre, religieux ou laïc. Gabriel, tu as rejoint ces centaines de martyrs d'Amérique latine.


(…) Il y a un an tu fêtais tes 25 ans d'ordination avec tes frères, Joseph, prêtre à St Claude, Bernard, ta sœur Marie-Thérèse. Je pense à eux dans la peine et la souffrance car tu étais très sensible Gabriel, et si présent à ta famille. Et la fête avait été si belle à Porto de Santana érigé en paroisse il y a trois mois et dont tu étais le premier  curé.


Je pense à eux, ce peuple de là-bas… à tous ces visages que j'ai aussi rencontrés parfois dans ce quartier populaire et que toi, tu connaissais si bien.
Gabriel, tu vas nous manquer terriblement. Tu vas manquer intensément à ta famille, à tes amis. Tu vas manquer à ce peuple…
Mais c'est sûr, la semence va germer car ton exemple, ton témoignage, le don de ta vie ont marqué des milliers de gens…


Jean Fugeray

Partager cet article
Repost0
30 octobre 2010 6 30 /10 /octobre /2010 15:00

Pour la période brésilienne de la vie du Père Jean Fugeray,(mais cette période ne s'est jamais terminée !) les repas du Seigneur avaient leur couleur propre et indélébile, celle des petites communautés. C'était un style participatif qui plaisait à Jean et dont il avait gardé une forte nostalgie.

 

Les jeunes souvent très présents, une guitare ou un accordéon, des dialogues à l'homélie, les petits enfants sur le sein de leur mère, quelques personnes âgées assises sur les cotés,  les réunions du Conseil qui les précédaient ou les suivaient, les baptêmes en grand nombre, la chaleur étouffante et dans les communautés plus riches un ventilateur bienfaisant, les nouvelles des malades et les projets pour un monde meilleur, voilà quelques aspects de ces longs repas du Seigneur dont Jean inlassablement relayait l'invitation auprès des paysans et des ouvriers  des banlieues : oui, heureux étaient-ils d'être ensemble, les laïcs et leur prêtre, leur Padre Joao (dont un paysan confiait un jour à l'évêque: il parle très mal portugais, mais il explique très bien) nourris d'une Bible en portugais simple, rendue accessible  par des cercles bibliques bien suivis, par des dessins, des théâtres, des cantiques.

 

Nous sommes heureux de nous joindre à la longue action de grâce de Jean, prêtre de ce diocèse et de l'autre,  envoyé en mission  ici et là-bas, disponible, batailleur et râleur,  joyeux dans l'adversité, inquiet pour des riens, tranquille pour l 'essentiel.

 

Avant que je le rejoigne, Jean était heureux de me vanter les charmes de cette Eglise de Vitoria qui, assez vite après le Concile, avait entamé cette conversion, ce choix prioritaire des pauvres.

 

Il a désormais rejoint les deux évêques Dom Joao et Dom Luis, le frei Lauro son grand ami, Gabi le martyr et le prophète, et les nombreux militants assassinés ou morts de leurs fatigues, mais aussi tous ces baptisés dont Jean admirait toutes les qualités humaines et spirituelles : les voilà tous assis à la table du Seigneur, humbles et donc pleins de reconnaissance, pour ce que Dieu avait fait en eux et par eux, parlant entre eux sans accent la langue de l'amour.

 

Oui: Heureux es-tu Jean et  tous les invités au repas du Seigneur !

 

Partager cet article
Repost0
28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 14:41

II y a cinq ans, les séminaristes avaient demandé à Gabriel de venir vivre au milieu d'eux au grand séminaire de Vitoria. Presque tous issus des communautés ecclésiales de base, ils voulaient rester fidèles au monde populaire qui les avait fait grandir comme hommes et comme chrétiens. Gabriel fut, pour eux, prêtre accompagnateur, habitant avec eux durant un an, sans jamais cesser d'accompagner les communautés dont il avait la charge.

Depuis trois ans, il était chargé du cours de pastorale au grand séminaire de Vitoria. Tous les séminaristes ont un engagement pastoral hors séminaire. Le cours de pastorale a pour fonction de les aider à revoir ce qu'ils font, d'en améliorer la pratique et de la fonder théologiquement. Il donne de la matière première aux études théologiques en lui posant les questions que la vie du peuple de Dieu pose et il rend opérationnelles les études théoriques.

L'Eglise locale, déjà si riche en laïcs engagés dans une évangélisation libératrice, voit maintenant surgir des ministres ordonnés et des consacrés en communion profonde avec les grands choix de Vatican II, Medellin et Puebla. Le diocèse de Vitoria do Espirito Santo a eu une extraordinaire fécondité parce qu’il y a eu continuité depuis le retour du concile de ses évêques Dom Joao et Dom Luis.

Gabriel est arrivé dans un mouvement pastoral puissamment enraciné depuis déjà une quinzaine d’années  et il était normal qu’après le temps où de nombreux laïcs ont découvert et vécu le message «l'Eglise, c'est nous», quelques-uns parmi eux se posent la question de la vocation sacerdotale ou religieuse et qu'ils cherchent un chemin de formation adapté à leur origine populaire et à leur futur ministère dans des communautés de base du monde populaire.

Dans cette étape de l'histoire du diocèse de Vitoria, Gabriel a pris aussi normalement sa place. Il est facile de penser que le développement d'un jeune clergé bien du pays issu du monde populaire, très en lien avec lui, fortement enraciné dans une pastorale latino-américaine libératrice dérange davantage les classes installées. Elles étaient plus à l'aise jusqu'alors avec un clergé à leur dévotion ou des religieuses pansant les plaies laissées par la société.

Aimant profondément l'Eglise, il a donné du temps à la formation des personnes qui aiment l'Evangile. Il a aussi souffert des lenteurs de cette Eglise, de ses hésitations et de ses marches  arrière. Il a souffert de l'énorme difficulté qu'a l'Eglise en Europe de comprendre vraiment ce qui se passe dans le peuple de Dieu en Amérique latine. Il a passé du temps, écrit de nombreuses lettres animées d'une fougue passionnée pour nous aider à mieux comprendre et à ne pas perdre l'espoir : une Eglise évangélique où les petits aient tout leur place, c'est possible !

Nous témoignons de cet espoir, nous qui avons eu la chance de faire partie de cette Eglise durant plusieurs années, dont quelques-unes avec Gabriel Maire à Vitoria.

Nous rédigeons ce témoignage à trois voix, le jour de la fête de saint Etienne, premier martyr. Nous relisons ensemble, avec l'émotion que vous devinez, la parole de Jésus : « Méfiez-vous des hommes, ils vous livreront aux tribunaux et vous flagelleront dans leurs synagogues. Vous serez détestés de tous à cause de mon nom. Mais celui qui aura persévéré jusqu'au bout, celui-là sera sauvé. »

 

Témoignages de Bernard COLOMBE, du diocèse de LYON, de Marcel CORTEY du diocèse d'AUTUN, de Jean FUGERAY  du diocèse de LANGRES

Partager cet article
Repost0
28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 14:35

Dans ces communautés, Gabriel rencontrait tous les jours le monde ouvrier. Les dernières années ont été très difficiles : l'inflation était galopante, plus de 20 % par mois, le pouvoir d'achat ne cessait de diminuer (n'oublions pas qu'au Brésil, de 1986 à 1989, on a ôté six zéros à la monnaie). Arrivant à Vitoria, Gabriel a perçu très vite la situation catastrophique des ouvriers ; à cette époque, la pastorale ouvrière était en route depuis quelque temps déjà au niveau du diocèse et au niveau du pays. La « Commission nationale de pastorale ouvrière » s'organisait. Gabriel a pris part très vite à tous ces efforts.

II s'agissait d'aider les ouvriers des communautés ecclésiales de base à découvrir, analyser, réfléchir aux causes de leur misère. La communauté, lieu d'Eglise, se devait d'être l'espace d'une telle réflexion.

Au temps de la dictature militaire, on avait commencé, dans le diocèse, à faire paraître le journal Serramenta-(l'outil), qui avait surtout pour but d'informer les ouvriers sur les événements ouvriers du pays et de les conscientiser petit à petit. Gabriel avait le don du journalisme, il a repris ce petit journal, a trouvé des collaborateurs, veillait jalousement à son impression, ses dessins et à sa distribution. Ce petit mensuel devait être de qualité.

Gabriel faisait souvent l’éditorial ; c'étaient généralement des chefs-d'œuvre de clarté et de simplicité où il reprenait les événements les éclairant de la lumière évangélique. Il ravivait sans cesse la conscience des ouvriers des communautés pour qu'ils s'engagent, sortent de la résignation et comprennent qu'être chrétien c'est participer à cette longue gestation d'une classe ouvrière plus consciente, plus organisée, plus libre et plus juste. Et pour que tout cela passe mieux dans quelques-unes de ces communautés, c'était l'équipe de pastorale ouvrière qui assumait, une fois par mois, l'animation liturgique du dimanche.

Le deuxième samedi après Pâques, il y a, à Vitoria, le pèlerinage des hommes au sanctuaire de Nossa Senhora da Penha, situé selon les cas à quinze ou vingt kilomètres des communautés. Les hommes partent vers 20 h des communautés et se rassemblent au sanctuaire, situé sur la hauteur, vers minuit.

Comme coordinateur de son secteur, Gabriel a beaucoup fait pour que ce pèlerinage parle le langage des ouvriers, entre dans leurs préoccupations, les aide à sortir de la résignation et de l'inertie. Naturellement, il marchait avec les hommes de ces communautés toute la nuit et passait aussi beaucoup de temps à préparer, avec les confrères, la célébration pour que les ouvriers se sentent interpellés et chez eux. Ce pèlerinage ordinaire a pris, grâce à Gabriel, une couleur vraiment ouvrière.

Bien souvent, on se demandait où Gabriel puisait tant d'énergie, aussi bien sur le plan physique que spirituel car, lorsqu'il y avait des grèves ou des meetings publics pour la défense des ouvriers et de la démocratie, il était toujours présent malgré tout son travail et son agenda bourré de rendez-vous.

Gabriel lisait et se nourrissait de la parole de Dieu : c'est grâce à la révélation d'un Dieu qui n'a fait qu'un avec notre histoire que Gabriel avait la force de ne faire qu'un avec l'histoire du peuple qui lui a été confié.

Témoignages de Bernard COLOMBE, du diocèse de LYON, de Marcel CORTEY du diocèse d'AUTUN, de Jean FUGERAY  du diocèse de LANGRES

Partager cet article
Repost0
28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 14:24

Le 8 octobre dernier, Gabriel Maire était installé comme curé de la paroisse Saint-François-d'Assise, le frère, le pauvre, le non-violent, sur la commune de Cariacica. Paroisse toute nouvelle créée comme un rassemblement de dix communautés ecclésiales de base. L'évêque, Mgr Sylvestre Scandian, venait de renouveler pour trois ans son mandat dans le diocèse. Gabriel était heureux de voir aboutir un long travail de formation de centaines de chrétiens, jeunes et adultes. Depuis neuf ans, il accompagnait cette population de 40 000 habitants, de gagne petit, soumis à de dures conditions de transport, de travail, de logement et de sécurité.

A l'autre bout de la même commune, il était au service d'une demi-douzaine de communautés de la paroisse du Bon Pasteur. Ce long cheminement quotidien de visites, de réunions, de célébrations, de joies et de souffrances individuelles et collectives, avait donne à Gabriel une énergie très forte pour défendre cette population contre tous ceux qui se moquaient d'elle. Il y avait des gens qui ne supportaient pas ce travail de libération, de mieux être collectif, d'espérance populaire que quelques droits fondamentaux seraient un jour respectés. C'était notamment le cas d'un petit groupe d'hommes qui s'étaient maintenus à la tête de la mairie pendant vingt ans, pour en tirer les meilleurs bénéfices et retarder le plus possible les installations de routes, égouts, écoles, postes de santé dont les gens avaient besoin.

Le 15 novembre 1988, un nouveau maire est élu sur un programme social qui va forcément léser les intérêts de ce groupe. Diverses manœuvres que Gabriel a racontées dans les Echos de Vitoria vont empêcher le maire élu, Vasco Aives, d'exercer son mandat. Les communautés se mobilisent alors dans toute la commune « pour la paix et la démocratie à Cariacica », selon le slogan adopté et affiché devant toutes les églises.

Avec deux autres prêtres, Gabriel reçoit alors des menaces de mort, en juin 1989. Protégé par la police pendant un ou deux jours, il préfère ne plus dormir chez lui pendant quinze jours. En décembre, les menaces reprennent, anonymes ou directes. L'évêques les a rendues publiques au cours de la célébration des funérailles de Gabriel, à la cathédrale de Vitoria, le dimanche 24 décembre. Devant des milliers de paroissiens et d'amis, cette annonce a coupé court à la version divulguée par les journaux d'un crime crapuleux... alors que rien n'a été volé, ni la voiture ni les documents ni l'argent.

Gabriel est mort d'une balle dans le cœur tirée à bout portant. L'enquête de la police fédérale devra chercher le tueur et ses motifs. Peut-être montrera-t-elle qui a donné l'ordre de tuer. Même si elle ne le faisait pas, les gens, eux, ont compris la logique de la vie du Padre Gabriel : ensemble, on peut faire quelque chose pour se rendre la vie moins dure ; ensemble on peut faire respecter quelques lois et pour cela il faut de la ténacité et du courage.

Les  gens  des  communautés  l'ont entendu réagir, prier, prêcher sur les événements qui abîmaient ou supprimaient la vie de tant d'êtres humains appauvris, opprimés par des « structures de péché » comme dit Jean-Paul II. Il voulait que cela change, il formait des responsables en grand nombre et dans une intense diversité de fonctions : baptêmes, Bible, trésorerie, associations, politique, rédaction de bulletins, histoire des communautés, chants, conseils, etc. Sa capacité d'animation et de coordination avait été reconnue : il était le coordinateur des communautés de Cariacica (200000 habitants) et célébrait souvent la messe télévisée locale.

Témoignages de Bernard COLOMBE, du diocèse de LYON, de Marcel CORTEY du diocèse d'AUTUN, de Jean FUGERAY  du diocèse de LANGRES

Partager cet article
Repost0
28 septembre 2010 2 28 /09 /septembre /2010 14:08

GABRIEL MAIRE : « MARQUÉ POUR MOURIR »

Agé de 53 ans, Gabriel Maire était, depuis neuf ans, prêtre d'une paroisse de Vitoria, la capitale de l'Etat d'Espirito Santo (jouxtant l'Etat de Rio). Au Brésil, mais aussi en France par l'intermédiaire d'une lettre intitulée « Echos de Vitoria », il ne cessait de lutter pour une Eglise engagée aux côtés des plus pauvres, dans la lutte pour la justice et la défense des droits de l'homme. Au Brésil, ces militants — qu'ils soient chrétiens ou non — sont généralement « marqués pour mourir » : c'est-à-dire que leur tête est mise à prix...

S'opposant depuis plusieurs années aux manœuvres de la famille Santini — qui règne sur Cariacica, la commune de Gabriel Maire, parla démagogie, la corruption et l'assassinat — Gaby était « marqué pour mourir ». La « sentence » a été exécutée le 23 décembre : après une réunion à l'église, quelqu'un lui a demandé de le conduire en voiture a quelques kilomètres de la ; on devait retrouver le cadavre de Gabriel Maire, tué d'une balle en plein cœur... Inutile de dire que « l'autostoppeur » avait disparu. Nous avons demand2 à trois prêtres français qui étaient ses amis, de dire qui était Gabriel Maire, quel était le sens de sa vie, quel est celui de sa mort.

1) Dans une Eglise qui grandit avec les pauvres

2) Dans une Eglise qui grandit avec le monde ouvrier

3) Dans une Eglise qui grandit avec ses séminaristes

Témoignages de Bernard COLOMBE, du diocèse de LYON, de Marcel CORTEY du diocèse d'AUTUN, de Jean FUGERAY  du diocèse de LANGRES

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Les amis de Gabriel MAIRE
  • : L'association "Les amis de Gabriel MAIRE" a été créée après l'assassinat de Gaby au Brésil le 23 décembre 1989. . A associação "les Amis de Gabriel Maire" foi criada depois da morte do Padre Gabriel em Brasil o 23 de dezembro de 1989.
  • Contact

A partir de novembre 2014, le blog devient bilingue. Les pages pour nos amis brésiliens sont visibles à partir du lien "Em portuguès" N'hésitez pas à vous inscrire ci-dessous pour être informé des mises à jour. Merci !

A partir de novembro de 2014 o blog se torna bílingue. As páginas para os nossos amigos brasileiros ficarão disponíveis com o "vínculo "Em português". Não hesitem em inscriverem-se para serem informados das notícias actualizadas.Obrigada !

Recherche

Gabriel Vivant !

« Prophète Gabriel, ta lutte n’a pas été vaine.

Le sang des martyrs est semence de nouveaux Chrétiens. »