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5 mars 2020 4 05 /03 /mars /2020 13:53

Vitoria-Flexal, le mercredi 18 décembre 2019

 

COMMENT TU AS FAIT GABY, POUR SAVOIR QUE JESUS ETAIT LA-DEDANS ?

 

Aujourd’hui nous sommes prêts à partir marcher là où Gaby a marché et tracé, aux abords du marais en plein FLEXAL. Ce territoire porte ce nom parce qu’il y a très longtemps il y avait là une forêt de bambous. C’était un endroit où vivaient des Indiens. Avec ces bambous, ils faisaient leurs arcs et leurs flèches : Fléchas.

 

Nous partons rencontrer des gens avec qui Gaby a vécu. J’ai envie de lui dire dans notre prière de contemplation et d’émerveillement : « Comment tu as fait, pour savoir que Jésus était là-dedans ? » Et je l’entends qui me répond : « Partout où il y a des gens qui sont solidaires et qui s’aiment, Jésus est là-dedans. » Et nous allons en rencontrer des gens qui s’aiment et qui sont solidaires les uns des autres ! Comme Gaby, ils continuent de donner leurs vies pour ceux qu’ils aiment. François, notre ami photographe dit : « Là où il y a un chemin, il y a une volonté. »

Nous quittons la maison de Penha et Gelso vers 8h45. C’est Ailton qui nous accompagne. Si j’ai bien compris, cet homme est responsable dans la communauté ecclésiale, et il a à dessein de se présenter aux prochaines élections municipales.

 

JUSQU’A AUJOURD’HUI, PADRE GABRIEL N’EST PAS MORT. IL EST VIVANT AVEC NOUS.

Aiton nous emmène chez une femme, où il faut passer par un tout petit jardin planté de rosiers blancs. Cette femme s’appelle Dona Laura. Elle nous raconte qu’elle est une des premières habitantes de ce coin de terre. Après avoir bâti leur petite maison, avec quelques membres de leur famille et des voisins, ils ont voulu bâtir un petit habitacle pour s’y rassembler et prier. D’emblée, elle nous dit que Gaby avait donné à cette petite maison en planches, le nom d’un homme qui avait été tué en raison de ses engagements sociaux : Santo Dias. Cette femme, Dona Laura, est très peinée, parce qu’aujourd’hui les responsables de la communauté ont arrêté d’appeler ainsi leur église. Ils lui ont donné le nom de : « Eglise du Christ-Roi ». Pendant que Dona Laura nous raconte cela, arrive Isabela, chez qui on descendra tout à l’heure.

 

 

Dona Laura continue en nous disant : « Vous êtes les amis du prêtre que je considérais comme mon papa. » Dans ce quartier, quand nous avons commencé d’y habiter, il n’y avait pas l’eau, ni l’électricité, ni les bus pour aller au travail. Il y avait à peu près 3 ans que l’on habitait là, j’ai dit un jour à quelques voisins : «  Il n’y a pas non plus d’église ici, il faut qu’on trouve des planches pour faire un abri. C’est ce qu’on a fait. C’était sur la terre battue. C’est à ce moment-là que Padre Gabriel est venu nous voir. On était heureux qu’il vienne nous voir. Il a dit : « On va donner un nom. » Il a proposé Santo Dias « parce que cet homme avait été tué à cause de ses engagements. Quand Padre Gabriel a été tué, on a enlevé notre Padre Gabriel, mais pas de notre cœur. Tout le monde a été dans la peine. »

 

 

Quand on a commencé de bâtir l'église, j’étais aide-ménagère chez des gens riches. Nous étions pauvres comme Job dont on parle dans la bible. Mais Padre Gabriel était notre père, j’étais seule avec 5 fils. Mais Dieu, avec l’Esprit-Saint nous a aidé tous les jours jusqu’à maintenant. Padre Gabriel reste en nous. Jusqu’à aujourd’hui Padre Gabriel n’est pas mort, il est vivant avec nous.

 

  « C’EST JESUS QUI EST NOTRE SECURITE »

Les nouveaux responsables de la communauté ont voulu donner un nouveau nom à cette église. Ils l’appellent : « Christ-Roi » pour moi elle dit : « C’est toujours Santo Dias » D’ailleurs, la rue porte le nom de cet homme. Je suis la dernière de l’époque à rester ici. Je prie Dieu pour que le Brésil puisse continuer longtemps… Aujourd’hui, c’est la guerre. Il y a beaucoup de violences. Les gens s’enferment chez eux. J’ai peur. C’est Jésus qui est notre sécurité.»

François notre ami photographe propose que ce témoignage soit écrit, comme d’autres et qu’il soit mis dans le dossier pour la béatification de Gaby. Il explique que l’on a rencontré l’évêque de Vitoria, Don Dario… Dona Laura dit : «  Ce que je sais, je le dirai »

Elisabeth offre à cette femme la croix de Taizé que Gaby portait sur lui et qu’il avait offerte à beaucoup de gens lors de ses retours de congé en France.

 

GABY N’A-T-IL PAS ETE « PEDAGOGUE DES OPPRIMES » ? ! (Paolo Freire)

Nous entrons dans la petite église qui est en face de la maison de Dona Laura. Je repense, en écoutant ce que cette femme vient de nous dire, à ce que les gens des Minerais dans mon village de Dampierre dans le Jura, avaient fait avec Marcel Blondeau leur curé en 1957. Sa pédagogie, sa façon de vivre avec les gens était très ressemblante à celle de Gaby qui était son ami. Les gens du hameau des Minerais et Marcel avaient réalisé ensemble une petite chapelle dont il ne reste rien hélas aujourd’hui. Il me revient aussi ce que Jésus avait dit à François d’Assise : « François, répare mon Eglise »

Puis, les gens qui sont arrivés au moment où nous sommes entrés dans l'église se mettent à chanter. Nous nous présentons les uns aux autres. J’ai l’impression que nous sommes en train de célébrer ce que nous venons d’entendre raconter par Dona Laura et ce que nous allons voir encore et reconnaitre de la « pédagogie des opprimés. » Gaby et tant d’autres ont su inventer, réaliser et susciter un nombre incroyable de « communautés ecclésiales de base » dans le sillage de Medellin et Puebla. Nous sommes en pleine « théologie de la libération ». Je suis venu chercher les traces de cette théologie et je me trouve devant la même constatation quand je cherche ce qu’il reste de ce que nous vivions en équipe JOC, ACE, ACO. Des hommes et des femmes qui vivent en conformité avec l’évangile de Jésus et qui ont grandes difficultés à continuer de trouver la communauté où coule la source qui nous a tant alimentés dans nos luttes : ta présence aimante Ami Jésus. Je crois que tu continues d’être là au milieu de nous. Il y a une même pédagogie à inventer aujourd’hui pour que nous trouvions le souffle qui nous permette de nous libérer de ce qui nous opprime. Nous sommes dans une société de consommation qui nous enferme et nous broie. Elle nous casse les uns des autres. Elle nous enfouit et nous annihile. Elle empêche de faire germer, pousser et porter du fruit. Comment ensemencer et planter tout cela ? Comment le chanter aussi ? Nos amis brésiliens entonnent alors un chant que Gaby aimait beaucoup :

 

« Vient un jour nouveau où il n’y aura plus ni esclave ni homme libre, ni femme, ni homme… »

Et quelqu’un dit : «  On chantait ce chant à toutes les messes avec Padre Gabriel… »

« … Le noir ne sera plus prisonnier, l’indien ne sera plus méprisé et spolié de sa terre, le blanc …

tous nous mangerons au même plat

la femme aura des droits

aux décisions elle pourra participer

ce n’est que quand nous serons réunis comme nous l’étions à Jérusalem,

que l’Esprit-Saint sera avec nous. »

 

Au moment où nous allons dire au revoir à ces gens qui viennent de nous aider à chanter notre libération, la leur et la nôtre, celle de toute la terre, Dona Laura sort de chez elle et vient à notre rencontre. Elle a plein de roses sur les bras et nous en donne une à chacun, une belle rose blanche sur sa tige, auréolée de feuilles vertes. En nous les offrant, elle nous raconte ce que Gaby lui avait dit un jour : « Dona Laura, fais un jardin dans la terre devant chez toi. Plante dedans des roses blanches. Un jour, tu pourras offrir des roses à des gens que tu n’avais encore jamais rencontrés… » Parole prophétique de Gaby une fois encore. Qu’en ferons-nous ? Quand ferons-nous de même ?

 

 

 

 

QU’EST-CE QUE NOUS EN AVONS APPRIS DES CHOSES AVEC PADRE GABRIEL !

Et nous voici chez Isabelle et son père Serge, dans leur maison. Nous demandons à Serge : «  Quels sont vos souvenirs avec Gaby ? »

Serge : Padre Gabriel nous a appris à nous rassembler et à savoir comment aller vers les autres. Il a célébré notre mariage ma femme et moi. Son objectif et le nôtre, c’était d’apporter la paix à Cariacica.

Les politiciens ne nous regardaient pas avec importance.

Ailton, qui a été cité par Gaby dans les « Echos de Vitoria » prend beaucoup la parole chez les gens chez qui il nous conduit. Cependant il nous aide à rencontrer des gens qui vivent vraiment en grande précarité. Ces gens que nous rencontrons ont appris à lutter grâce à Gaby, pour sortir de ce qui les opprimait. Comment se continue cette lutte ? Car l’oppression est toujours là. Dans nos cœurs, nous voudrions bien qu’Ailton se présente dans ces visites que nous réalisons, non comme un leader mais comme celui qui aide les gens qui l’éliront, à se sortir d’où ils sont enfoncés par Bolsonaro le nouveau président de la république.

 

Serge continue à nous dire : « Padre Gabriel nous avait demandé d’écrire ce que nous vivions sur un cahier. » Les gens sourient en me regardant écrire sur mon cahier ce que Serge est en train de nous partager. Savaient-ils que leurs témoignages étaient souvent écrits par Gaby dans les échos de Vitoria qui nous parvenaient dans le Jura ?

Serge continue à raconter comment Gaby les a beaucoup accompagnés dans leur vie : « Il a célébré notre mariage et le baptême de notre fille Isabelle qui est là. Avec lui nous avons créé une école pour nos enfants… »

Isabelle : « Je suis coordinatrice de la communauté du Christ-Roi. Beaucoup de gens qui ont connu Gaby sont entrés dans des groupes évangéliques… »

La petite fille Espérance nous habite en remontant ce chemin qui a pour nom Santo Dias, que la pédagogie de Gaby, sa façon de vivre avec les opprimés, se maintienne.

 

AVEC PEU, ON PEUT TRANSFORMER BEAUCOUP DE CHOSES !

Nous voici chez Lia, une jeune avocate et journaliste, qui reste dans ce quartier et qui, avec des moyens simples, essaye de promouvoir le souffle culturel que des gens voudraient faire entrer dans leur vie.

Elle n’a pas connu Gaby mais sa façon de vivre lui ressemble beaucoup. Elle est avocate. Elle a fait le choix de rester dans son quartier pour être au service des plus démunis, afin de promouvoir dans sa cuisine des cours ménagers, dans son jardin une façon de cultiver, et dans ce qui lui reste de temps, des animations de cirque. « Nous n’avons de l’eau que la nuit » nous dit-elle. Elle est en partenariat avec l’école, pour la radio, la littérature, la cuisine, le cirque et la décoration. En ce qui concerne la radio, elle cherche à donner la voix et la parole aux personnes de la communauté, et à révéler l’image du quartier. Elle nous dit : «  Je ne viens pas de la pauvreté, je viens de la misère… J’avais 8 ans quand une voix m’a fait comprendre qu’il fallait que j’étudie beaucoup, afin de ne pas rester dans les difficultés familiales et sentimentales… agir pour que les enfants ne soient pas ce que j’ai été… qu’ils ne vivent pas ce que j’ai vécu… Notre population a doublé mais les structures : eau, égouts, électricité, n’ont pas été développés en conséquence de l’augmentation de la population… »

 

 

C’est avec une profonde émotion que nous nous disons au-revoir Lia et nous. Elle nous dit alors : «  Notre maison est encore plus bénie maintenant que vous êtes venus »

 

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  • : L'association "Les amis de Gabriel MAIRE" a été créée après l'assassinat de Gaby au Brésil le 23 décembre 1989. . A associação "les Amis de Gabriel Maire" foi criada depois da morte do Padre Gabriel em Brasil o 23 de dezembro de 1989.
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